#3 questions à Arnaud Assoumani, Champion Paralympique d’athlétisme
A moins d’un an du coup d’envoi des Jeux Paralympiques, et à deux semaines de la deuxième Journée Paralympique qui se tiendra le 8 octobre, nous revenons sur les enjeux de visibilité et d’accessibilité des Jeux Paralympiques et sur le rôle des associations dans cette sensibilisation avec Arnaud Assoumani, Champion Paralympique d’athlétisme.
1) Les Jeux Paralympiques auront lieu pour la 1ère fois en France dans un an. Qu’attendez-vous de ces Jeux pour la mise en visibilité des sports paralympiques et l’accessibilité universelle ?
Pour les Jeux Paralympiques, nous attendons beaucoup plus de visibilité d’une part grâce au 300h de direct prévues sur France Télévision, ce qui est beaucoup plus que ce qu’il y a pu y avoir à Tokyo et bien plus que les Jeux d’avant puisque les Jeux Paralympiques d’été ont été diffusés pour la première fois en direct à Rio. Ça va amener un immense coup de projecteur pour tous les athlètes mais également pour toutes les personnes en situation de handicap.
Ça va également mettre la lumière les problématiques d’accessibilité. C’est déjà un petit peu le cas maintenant, il y a des mesures qui ont été prises par le gouvernement avec un peu plus d’1 milliard d’injectés pour l’accessibilité. Pour ces Jeux là, pour les personnes qui vont venir du monde entier, pour les transports, l’hébergement, c’est un petit peu tard. Ce qu’on souhaite en tant qu’athlète par rapport à ces Jeux, c’est de laisser un héritage positif pour la société, et pour ce faire, on a besoin de tout le monde. Ce n’est pas que Paris 2024, qui a des ambitions d’avoir des Jeux spectaculaires, avec une cérémonie en dehors du stade, des écrins incroyables pour tous les athlètes ; mais on a aussi besoin des collectivités territoriales, de la Région, de la Ville de Paris, du Gouvernement, pour réellement se rendre compte des problématiques, qui sont des problématiques qui dépassent simplement celles des personnes en situation de handicap mais qui concerne tout le monde, comme le sport santé, où les enjeux d’accessibilité sont fort. Mais le sport est un levier majeur pour changer le regard et la perception sur le handicap.
2) Vous êtes très impliqué auprès des écoles pour sensibiliser à l’inclusion dès le plus jeune âge. Comment pensez-vous que les associations et les athlètes peuvent s’unir pour enseigner le vivre ensemble à ces générations ?
Il y a un gros besoin de sensibilisation et de pédagogie et c’est ce que je souhaite faire à travers mes interventions dans les écoles. J’échange sur mon parcours, mais également sur les difficultés que j’ai pu vivre, notamment le harcèlement scolaire, et sur ce que m’a apporté le sport ; pour rencontrer d’autres personnes, sur le lien social, sur la confiance en soi. Ensuite c’est aussi de partager avec eux et qu’ils puissent essayer différents sports paralympiques comme le cécifoot ou le basket fauteuil. Par le jeu, par le ludique, les messages passent vite, beaucoup plus avec les enfants qu’avec les adultes. Ce travail que font beaucoup d’associations, d’autres athlètes et d’autres acteurs sur le terrain, est très important et complémentaire avec ce qui est mis en place par les clubs para accueillants. Un peu plus de 3 000 sont formés et ça va dans le bon sens. On a besoin de former encore plus parce que lorsqu’on dit sport pour toutes et tous, ça implique de pouvoir se dire n’importe où, ce soit en milieu rural, dans des quartiers : si j’ai envie de faire du sport et j’ai un handicap, c’est possible. En terme de droits et d’équité, c’est essentiel.
Ce sont des actions de sensibilisation assez simples mais efficaces, comme la 2ème Journée Paralympique qui se tiendra le 8 octobre. L’année dernière, ça a très bien fonctionné, avec 160 athlètes olympiques et paralympiques présents et un peu plus de 30 000 personnes qui se sont réunies. J’ai rarement vu autant de diversité en France sur des événements, et j’ai un peu ressenti la même chose qu’aux Jeux Paralympiques de Londres en 2012. On a besoin d’événements, on a besoin de vie, et pas de montrer les choses derrière une étiquette, de manière cachée, un peu en entre soi. Et ça peut être aussi vrai pour des associations qui travaillent dans le monde du handicap et qui pour certaines raisons, parfois par peur du rejet, peuvent ne pas avoir envie de s’ouvrir aux autres. Pour moi, c’est essentiel de créer ce lien-là.
3) En 2022, vous avez bénéficié de l’accompagnement “Impact 2024 – athlètes entrepreneurs Paris 2024 x AFD” avec votre projet de création de kits pédagogiques et ludiques pour sensibiliser les adolescents et les jeunes adultes et lutter contre les stéréotypes sur le genre, sur le handicap. Pouvez-vous nous en dire un peu plus, à la fois sur le projet et sur l’accompagnement reçu ?
C’est un projet que j’avais présenté dans le cadre de l’appel à projets Impact 2024, lancé par Paris 2024 et l’AFD, et de l’accompagnement proposé par Ticket for Change. Les outils que j’utilise sont le sport, la culture et l’éducation pour travailler sur différentes problématiques. A la base, l’idée était de créer des kits pédagogiques pour favoriser le lien social par le sport et la culture, plutôt destinés en Afrique, au Sénégal et aux Comores dont je suis originaire. Nous avons été accompagnés par Ticket for Change et ce fut comme créer une start-up, que ce soit un modèle associatif ou d’entreprise, les mécanismes ou la méthodologie sont similaires avec des spécificités pour les projets à impact. Le projet s’est précisé pour travailler à faire en sorte que par le jeu et avec la culture, à travers des kits pédagogiques, on puisse permettre à des jeunes adolescents d’apprendre à lire et à écrire. Le plus gros décrochage au Sénégal et dans de nombreux pays d’Afrique, c’est l’analphabétisme. Il y a des millions de personnes qui ne savent ni lire ni écrire et quittent l’école assez jeunes, bien plus jeunes que nous en France. C’est un projet que je n’ai pas encore développé car je suis encore en carrière, mais il est là.
Je travaille également avec Play international, une ONG qui fait de l’éducation par le sport, et qui a développé une méthode appelée la « Playdagogie ». Ils travaillent sur les méthodes d’éducation et sur comment partager le savoir et développer l’apprentissage pour toute les populations, en s’inspirant d’outils moins traditionnels de ceux que l’on peut avoir et en essayant d’aller plus loin pour les développer.
> Plus d’informations sur la 2ème Journée Paralympique ici